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Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/234

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officiers en tête, assista à un Te Deum solennel. Les vieux soldats d’Italie, cherchant au fond de leurs souvenirs les airs liturgiques qui avaient bercé leur enfance, chantèrent des cantiques, et nombre de curieux visitèrent la grotte de l’Annonciation où la Vierge avait reçu la visite de l’ange Gabriel.

Saint-Jean-d’Acre, que Bonaparte allait assiéger en vain pendant soixante-deux jours, était défendu, non seulement par les Turcs du Pacha Djezzar, mais encore par le commodore anglais Sydney-Smith qui était entré dans le port avec deux vaisseaux de 80.

Malheureusement les petits bâtiments français qui amenaient d’Égypte les canons de gros calibre, destinés au siège d’Acre, furent pris en mer par les Anglais, et tous les efforts de l’héroïque armée d’Égypte se brisèrent contre les épais remparts de la ville. En vain, Kléber battit au Mont-Thabor une armée turque, envoyée de Damas au secours du Pacha ; Bonaparte ne put entrer dans la ville, que d’ailleurs la peste ravageait comme elle avait ravagé Jaffa.

Manquant de canons, le général en chef eut recours à la mine.

La clef de Saint-Jean-d’Acre était le palais même de Djezzar ; il dominait les remparts. Le pacha, sentant qu’il pouvait être enlevé d’un moment à l’autre, avait fait transporter sur les vaisseaux anglais ses trésors et ses femmes et s’y était réfugié lui-même.

Le point le plus haut de ce palais était une tour énorme, d’où les Turcs faisaient pleuvoir, nuit et jour, un feu d’enfer sur les tranchées françaises ; à tout prix il fallait les déloger de ce point culminant, et comme les pièces de huit ne pouvaient mordre sur ces épaisses murailles, le général du génie Caffarelli, qui conduisait les opérations du siège, résolut de la faire sauter.

C’était une tentative difficile et périlleuse.

Il s’agissait de pénétrer à l’intérieur de cette tour par une poterne qui s’ouvrait à quatre mètres au-dessus du fond du fossé, d’y déposer, en un point convenablement choisi, quelques centaines de kilogrammes de poudre, et d’y mettre le feu sans attirer l’attention des défenseurs. Bonaparte demanda par la voie de l’ordre, soixante hommes de bonne volonté. Quand cet ordre fut lu dans le camp, Jean Cardignac revenait d’une longue reconnaissance de l’autre côté du Jourdain, et l’escadron de dromadaires venait de recevoir l’ordre de reprendre du service à pied dans le corps du siège.

Toute cette dure campagne qu’il venait de faire ne lui avait pas rapporté