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Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/418

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ment par les débris des corps d’armée des maréchaux Marmont et Mortier.

La bataille engagée à quatre heures du matin, de Vincennes à Montmartre, se termina le même jour, à cinq heures du soir, par la capitulation de la grande ville.

La veille, l’impératrice Marie-Louise et le petit roi de Rome, escortés par un détachement de la Garde impériale, étaient partis pour Blois.

Jean Cardignac apprit ces tristes événements le 15 avril.

Il avait choisi pour entrer en France la route de Givet, Vouziers et Reims qui lui faisait éviter les grandes directions suivies par les Alliés ; mais il avait hâte maintenant de quitter l’uniforme étranger, d’ailleurs dangereux dans cette région occupée seulement par de faibles détachements des armées alliées.

Dès le premier village français en effet, alors qu’il lui eut été si agréable d’entendre parler sa langue maternelle, il avait vu les portes se clore et les paysans s’enfermer chez eux sans répondre à ses questions.

Il résolut donc de se confier au premier maire venu, de lui raconter son évasion et de lui demander des vêtements.

Car il n’avait plus qu’une idée fixe, rejoindre l’Empereur qui était revenu précipitamment vers Paris en apprenant que le sort de sa dynastie allait s’y jouer, et qui, paraît-il, se trouvait à Fontainebleau.

Ce matin-là, Jean avait de bonne heure traversé à cheval, sans rencontrer âme qui vive, une épaisse forêt, et à l’aube il en déboucha à quelque distance d’un petit village enfoui dans la verdure.

Soudain, il se sentit tout remue : la vue d’un clocher en pierre émergeant au-dessus des arbres, venait de réveiller dans son âme un souvenir d’autrefois.

Où et quand avait-il déjà vu ce pays là ?

Il ne pouvait s’y tromper ; le petit ruisseau qui roulait le long de la route, la lisière foncée des bois, le village allongé dans le sens du chemin, et le clocher surtout, massif et carré, tout cela lui donnait la sensation du « déjà vu ».

Il arriva dans le village et demanda son nom, car il n’avait, bien entendu, ni carte ni renseignements d’aucune sorte.

Mais le paysan auquel il s’adressa, après s’être assuré d’un coup d’œil que l’officier n’était pas suivi, ferma brusquement sa porte et ne répondit point.