Aller au contenu

Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 2, 1899.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE III

dans les cachots de la kasbah !


Les captifs demeurèrent donc immobilisés par leurs liens, et, les lèvres closes par le bâillon, ils durent assister, muets d’horreur, à la scène atroce qui suivit.

Les morts, leurs morts français étaient restés sur place ; plusieurs Arabes, au visage féroce, vinrent, avec une impassibilité cruelle, leur couper la tête. Henri ferma les yeux et se sentit défaillir. Maintenant que l’exaltation du combat était tombée, tout ce que sa mère, la douce Lison, lui avait mis de tendresse et de sensibilité au cœur, fût bouleversé par cet affreux spectacle.

Puis ces têtes furent rassemblées, et un nègre, simplement vêtu d’une large culotte bouffante, les prit et les plaça dans des sacs de cuir, que des femmes arabes, au visage enveloppé d’un kaïck blanc, avaient apportés.

Ces dernières, curieuses, vinrent examiner les captifs, et l’une d’elles, sauvage aussi bien que ses compagnes, prenant une longue épingle d’argent qui retenait sa gandourah, la piqua dans la cuisse de Goelder qui, malgré son bâillon, poussa, sous la douleur, un hurlement féroce.

Les rires éclatèrent, mêlés de cris bizarres, qui formèrent un instant un vacarme assourdissant autour des prisonniers.

Soudain, elles se turent et s’enfuirent. Un Arabe à barbe grisonnante, au visage intelligent, grand, bien musclé, vêtu de drap bleu soutaché d’argent, venait d’intervenir. Son bras vigoureux maniait un fouet à quatre lanières, en cuir tressé.