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Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/322

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Tous deux tombaient sanglants, la gorge ouverte d’un terrible coup de poignard, en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire.

Fou de Stupeur, Descamps avait jeté les yeux de tous côtés pour chercher une arme et, n’en trouvant pas, se hissait dans son observatoire près des hélices.

Mais il y arrivait à peine que frappé de deux balles il s’abattait lourdement sur la plate-forme.

Il en manquait un et Saladin cherchait autour de lui, ivre de carnage, lorsqu’une exclamation d’horreur lui fit lever la tête.

C’était le petit Roffa qui l’avait poussé.

Profitant de l’arrêt momentané de l’aérostat à faible hauteur, il s’était porté rapidement, à l’aide des poignées de cuivre réparties sur l’enveloppe, jusqu’au premier des trous que les balles arabes avaient pratiqués dans le cône inférieur.

Les yeux agrandis par la terreur, il venait d’assister au quadruple assassinat et, seul survivant de l’équipage à bord, il décelait sa présence par un cri involontaire.

Une troisième fois Saladin abattit son arme et le corps traversé, lâchant les poignées, le pauvre petit marin s’abattit dans le vide en tournoyant.

Une vigoureuse secousse se fit sentir aussitôt, le ballon délesté de ce premier poids voulait s’enlever.

Saladin se pencha : à moitié chemin de l’échelle Regnard arrivait, remontant comme un chat.

Un dernier sifflement partit de l’arme homicide « l’arme de l’assassinat », avait dit Guy de Brantane, et Regnard lâchant l’échelle, vint se briser sur le sol.

Alors rejetant sa carabine désormais inutile, Saladin prit la hache de manœuvre, et d’un double coup sec tranche les nœuds qui rattachaient à la balustrade de la nacelle l’échelle extraordinairement tendue.

Le ballon fit un bond énorme et délesté de 200 kilogrammes s’élança dans les airs. Un cri s’éleva dans l’espace, cri de triomphe sauvage qui plana sur les cinq cadavres étendus dans la nacelle.

Saladin venait de réaliser son rêve sanglant.

Il avait franchi la première étape vers la vengeance.

Il montait, montait, ivre d’une joie féroce, embrassant