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Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/324

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Quittant l’officier, il se précipita vers lui croyant a un accident.

Mais en le soulevant, il vit le sang coulant à flots d’une blessure à la poitrine.

— Roffa, dit-il, vous êtes blessé… mais comment ?

Le petit marin tourna vers lui des yeux déjà voilés.

— Assassiné, monsieur, dit-il, d’une voix faible, assassiné par ce…

— Assassiné ! répéta Guy de Brantane dans un geste d’épouvante.

— Oui, par ce Saladin… Les Touaregs ont tué aussi… les autres et j’ai vu…

— Et M. Durville ?

— Tué aussi par l’interprète d’un coup de carabine… Oh ! monsieur, monsieur… j’étouffe…

Et comme Guy affolé se penchait vers lui, un nouveau corps, un cadavre cette fois, celui de Regnard, vint s’abattre au pied de l’échelle.

Dans une vision rapide, Guy levant les yeux vit Saladin l’arme à l’épaule, assistant à la chute, un rire satanique aux lèvres.

Puis l’échelle rompue décrivit une spirale dans les airs et tomba à terre aux pieds du cheval qui, d’abord, presque soulevé par la force ascensionnelle de l’aérostat se débattait, ruait, cherchant à fuir.

Et, sous les yeux de Guy, le ballon s’enleva vers le zénith avec la rapidité d’une bombe sortant du mortier.

Guy resta là stupide, hébété, suivant des yeux l’aérostat qui décroissait rapidement.

Près de lui l’officier était retombé sur le sable, épuisé, les yeux clos.

Dans quelle horrible situation se trouvaient-ils tous deux, perdus, abandonnés dans ce désert qui venait de boire tant de sang ?

Et quel effroyable rôle venait de jouer cet homme dont la silhouette lui apparaissait dans une lueur de fièvre, l’arme à l’épaule, ricanant comme un démon !

Guy se tata les membres et regarda autour de lui.

Rêvait-il ou devenait-il fou ?

Non, il ne rêvait point, car à l’horizon il venait d’aper-