Aller au contenu

Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques heures avant qu’elle justifiât ce titre. Grâce à elle il était sûr de tuer sans bruit, sans fumée, sans éclair. Le jet d’hydrogène chassait la balle avec une vitesse supérieure à celle que jadis lui imprimait la poudre.

Pourquoi avait-il tant tardé ? ce Zahner, d’ailleurs, n’aurait-il pas dû depuis longtemps déjà payer de sa vie ses brutalités de soudard ?

Dès lors Saladin résolut d’attendre l’occasion, de ne plus quitter le camp sans avoir rempli au moins la première partie de sa tâche, priver de Melval de son ami et de sa maîtresse.

Après quoi, il s’occuperait du capitaine.

L’attaque de la flotte, le passage du détroit s’il se réalisait, la levée du camp si l’armée noire, changeant de direction, se dirigeait vers le Nord, lui fourniraient certainement l’occasion cherchée : désordre, prise d’armes inopinée, mouvements quelconques pendant lesquels, posté derrière le bordage de la nacelle, il verrait bien passer à portée de sa carabine Zahner et Nedjma.

Quant à ce qui pourrait en résulter, il n’y voulait point songer, tant la haine en lui parlait plus haut que tout le reste.

Elle lui pesait comme un fardeau trop lourd il ne se trouvait pas suffisamment vengé des dédains de Christiane par le tourment qu’il avait infligé à celui qu’elle aimait. — Et d’ailleurs ce tourment avait été de trop courte durée : il fallait étouffer sans retard le bonheur naissant qui l’avait suivi.

Il remonta dans la nacelle après avoir recommandé de nouveau à Mata de faire bonne garde, car l’ancre retenue seulement par de jeunes pousses de palmier « doum » ne lui semblait pas aussi solidement fixée que d’habitude.

Mais il ne put trouver le sommeil, et déchargeant l’un des Soudanais de son équipage du service de garde qu’il répartissait entre eux chaque nuit, il s’accouda le front brûlant contre le bastingage.

Son regard errait sur le camp, mais il ne pouvait se détacher de la tente de de Melval, que Selim lui avait désignée en le quittant avec un geste qui signifiait :

— Ils ne s’embêtent pas là-dedans !