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Page:Drieu la Rochelle - Le Feu Follet (1931).pdf/12

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froideur empruntée. Sa peau, c’était le cuir d’une malle de luxe, qui avait beaucoup voyagé, fort et sali. Ses seins étaient des emblèmes oubliés. Elle s’essuya, en écartant ses cuisses où les muscles se ramollissaient un peu. Puis elle rentra dans la chambre pour y prendre son sac.

Alain se promenait en long et en large, en fumant une nouvelle cigarette. Elle en reprit une aussi. Alain la regarda, sans beaucoup la voir ; selon sa vieille habitude, il fouillait du regard cette chambre d’hôtel pour y découvrir un détail cocasse, sans doute navrant. Mais cette chambre de passe où défilait un bétail ininterrompu était plus commune qu’une pissotière, on n’y voyait même pas d’inscriptions. Il n’y avait que des taches, sur les murs, sur le tapis, sur les meubles. On devinait sur les draps d’autres taches, masquées par la chimie du blanchissage.

— Vous ne trouvez rien ?

— Non.

Ce corps d’Alain, qui tenait une cigarette, c’était un fantôme, encore bien plus creux que celui de Lydia. Il n’avait pas de ventre et pourtant la mauvaise graisse de son visage le faisait paraître soufflé. Il avait des muscles, mais qu’il soulevât un poids aurait paru incroyable. Un beau masque, mais un masque de cire. Les cheveux abondants semblaient postiches.

Lydia était retournée à la salle de bain pour