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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/152

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LA MAISON DE JUSTICE.

coupable dans son passé. Son esprit rompu à la discipline militaire lui avait fait comprendre l’utilité de la hiérarchie ; il sut être maître avec fermeté et sans exagération.

La direction de Saint-Lazare appartient moins au directeur administratif qu’à la supérieure — à la mère — des sœurs de Marie-Joseph, qui ont la haute main sur toutes les détenues, quelles qu’elles soient. Leur autorité est telle, que le directeur et le brigadier ont seuls le droit de pénétrer dans l’intérieur de la prison, dont le service est fait par une quarantaine de religieuses. Celles-ci furent à la fois très simples et très hardies ; elles gardèrent leur robe noire, leur béguin blanc, leur voile bleu, le long chapelet qui pend à leur ceinture et continuèrent à surveiller les malheureuses dont elles ont accepté de prendre soin. La mère, sœur Marie-Éléonore, était une femme encore assez jeune, avenante, conduisant son troupeau avec une sorte de ferme enjouement, fort peu rassurée de ce qui se passait autour d’elle, mais cachant ses émotions, réconfortant les faibles, se confiant à la Providence, fort aimée de toutes les détenues et mettant dans ses actions assez de diplomatie pour avoir réussi à sauver la communauté de Saint-Lazare, dont elle était, dont elle est encore la supérieure (1877).

En présence d’un directeur énergique sans excès et d’un personnel de gardiens demeurés fidèles à la prison, le sort des religieuses n’aurait peut-être pas été trop pénible, si deux vilains drôles ne s’étaient installés à Saint-Lazare par ordre de Raoul Rigault et n’y avaient fait toute sorte de sottises. L’un s’appelait la Brunière de Médicis, l’autre avait pris le surnom de Méphisto, que nous lui laisserons. Le premier était pompier, c’est-à-dire ouvrier tailleur à façon ; il avait servi pendant quatorze ans au 1er zouaves, où il s’était distingué ;