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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/317

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LA MORT DE DELESCLUZE.

longtemps et qu’il était prudent de s’assurer une dernière retraite. Il donna des ordres afin que les différents services réunis autour de lui, la caisse où l’on devait puiser une dernière fois avant de se séparer pour jamais, les blessés principaux que l’on ne voulait pas abandonner aux troupes victorieuses, fussent évacués sur la mairie du xxe arrondissement, où l’on espérait, des hauteurs de Ménilmontant et des Buttes-Chaumont, pouvoir canonner Paris à outrance, pour se faire des funérailles « dignes d’un grand peuple ». D’après ses instructions, Gabriel Ranvier, Gambon, Protot avaient pris les devants et, de barricade en barricade, avaient gagné Belleville pour y préparer l’installation projetée.

C’est là, dans cette journée du 25 mai, que Delescluze signa l’ordre d’extraire tous les otages que renfermaient la Grande et la Petite-Roquette, quinze cents personnes environ, et de les transférer à la mairie et à l’église de Belleville. L’ordre communiqué à Ferré fut contresigné par celui-ci et remis à Benjamin Sicard, qui fut chargé, conjointement avec Émile Gois, d’en assurer l’exécution, aussitôt que la Commune, ou ce qui en subsistait, serait établie dans sa dernière caverne. Delescluze espérait encore pouvoir traiter avec le gouvernement légal. Il voulait, se retranchant derrière quinze cents otages tenus à discrétion, imposer des conditions que l’humanité seule aurait forcé d’accepter : ou le massacre immédiat de quinze cents innocents, ou la vie sauve et le droit de fuite pour les coupables ; il eût laissé le choix à « Versailles ».

Ceci fait, il eut une conversation de quelques instants avec le correspondant d’un journal américain ; puis, voulant sans doute se rendre compte par lui-même de l’état des choses, il sortit et se dirigea vers l’énorme barricade qui, s’appuyant aux numéros 1 et 2 du boulevard Voltaire, commandait les approches de la place du