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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/409

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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

vait prendre sur lui d’exécuter l’échange. Il a ajouté que M. Blanqui allait être jugé à nouveau, et que s’il était condamné à mort, il aurait lui, comme Président, le pouvoir de lui accorder la vie ; mais que, quant à le mettre en liberté, surtout avant qu’il fût jugé, cela lui était impossible ; que cela dépasserait son droit comme chef du pouvoir exécutif. Cette réponse, adressée à Mgr Darboy, il y a plus de deux semaines, a été couchée par écrit, et M. Lagarde a été prié de la porter à l’archevêque, sous enveloppe cachetée, comme elle était. Mais M. Lagarde a refusé, et persiste à refuser de le faire, donnant pour motif de son refus qu’il ne peut porter une lettre cachetée en réponse à une lettre qu’il avait apportée ouverte. Il en résulte que la lettre de M. Thiers est encore au ministère « des cultes », et on ne veut l’envoyer que par M. Lagarde, qui, de son côté, n’a pas envie de s’en charger.

M. Thiers veut aussi que je sois assuré qu’il est convaincu que ni les jours de l’archevêque de Paris, ni ceux des autres ecclésiastiques, actuellement prisonniers, ne sont en danger.

Quant à moi, je ne partage pas, je l’avoue, la confiance du président sur ce point.

4 heures. ― J’arrive de l’hôtel de la préfecture. M. Thiers a lu avec attention la copie du mémoire dont j’ai parlé plus haut, et il a répété, après mûre réflexion, les mêmes observations faites par lui dans sa réponse à Mgr Darboy. Il a résolu de ne point mettre Blanqui en liberté, mais d’épargner sa vie s’il était condamné à mort. C’est là tout ce que ses pouvoirs l’autorisent à faire. En outre, il ne lui serait jamais permis de sanctionner une iniquité, consistant à saisir des otages parmi les hommes éminents afin de faire élargir des garnements et des criminels, en l’amenant à se prêter à de pareils projets d’échange plus ou moins déguisés. Il a renouvelé l’assurance que la vie de l’archevêque ne courait aucune espèce de danger, et il a dit en terminant que dans deux jours environ les troupes seraient dans Paris et que tout péril aurait disparu.

Telle est, mon cher collègue, la réponse que je puis vous faire, et je regrette avec vous qu’elle ne soit pas plus en rapport avec le désir de l’archevêque, et avec votre généreux et charitable dessein. Permettez-moi, en finissant, de vous communiquer, conformément aux ordres que le cardinal Antonelli m’a transmis, les sentiments de gratitude de Sa Sainteté le Pape et du cardinal pour tout ce que vous avez fait et tout ce que vous pourrez faire en faveur de l’archevêque si injustement martyrisé.

Agréez, monsieur, avec mes sincères et affectionnés sentiments, la nouvelle assurance, etc.

Flavius Chigi,
Archev. de Myre, nonce apostolique.