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Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/16

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par son savoir, ait perdu son temps, non seulement à traduire en notre langue deux anciennes relations arabes sur la Chine, qui ne sont qu’un tissu d’absurdités et de mensonges ; mais encore à prodiguer son érudition par de longs éclaircissements qu’il a donnés sur ces Contes arabesques. Il ne fallait pas un grand fonds de critique, pour s’apercevoir que ces marchands arabes ne méritaient nulle créance, et n’avaient pas même mis le pied à la Chine : mais quand le cœur se laisse une fois préoccuper d’une passion, l’esprit est tout disposé à adopter les fables les plus ridicules, et à donner un air de vérité à tout ce qui est capable de décrier des personnes qu’on n’aime point, et qu’on se fait un mérite de ne point aimer.

Les savants n’ont pas tous cette sagacité et cette finesse de discernement qui saisit d’abord son objet, et qui sait démêler le vrai d’avec le faux, telle qu’on la trouve dans ces réflexions si sensées et si judicieuses, qu’un savant académicien[1] a fait sur la nation chinoise, et qu’il a proposées par manière de doutes au père Parrenin, dont il a reçu les éclaircissements qu’il souhaitait.

Ces sortes de relations, ou faites sans discernement, ou inventées à plaisir, ou concertées par la passion, tiennent les esprits dans l’incertitude, en rendant suspectes celles qui sont les plus vraies et les plus sincères, et faisant naître, dans des personnes même éclairées, certaines préventions, dont ils ne reviennent pas aisément. Combien en voit-on, par exemple, qui ne peuvent s’ôter de l’esprit que la nation chinoise pousse l’origine

  1. M. Dortous de mairan, de l’Académie des Sciences. Voyez le vingt-et-unième tome des Lettres édifiantes et curieuses pag.76.