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Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/237

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de tambour de cuivre, pour avertir l’idole de leur passage ; ils allument en son honneur des bougies sur le devant de la barque ; ils brûlent des parfums, et sacrifient un coq. On tâche de prévenir ces dangers par des barques qu’on y entretient, pour aller au secours de ceux qui courent risque de naufrage. Mais il arrive quelquefois que ceux qui sont établis dans ces barques pour prêter du secours, sont les premiers à faire périr les marchands, afin de s’enrichir de leurs dépouilles, surtout s’ils espèrent de n’être pas découverts.

Cependant la vigilance des magistrats de la Chine est très grande : un mandarin fait consister la gloire à assister le peuple, et à montrer qu’il a pour lui un cœur de père. Dans un temps d’orage on a vu le mandarin de Iao tcheou, après avoir défendu de traverser le lac, se transporter lui-même sur le rivage et y demeurer tout le jour, pour empêcher par sa présence que quelque téméraire se laissant emporter à l’avidité du gain, ne s’exposât au danger de périr.


Des canaux.

Outre ces principaux lacs il y en a un grand nombre d’autres dans les diverses provinces, lesquels joints à la quantité de sources, de ruisseaux, et de torrents qui se précipitent des montagnes, ont donné lieu à l’industrie chinoise de construire une infinité de canaux, dont toutes les terres sont coupées. Il n’y a guère de provinces, où l’on ne trouve un large canal d’une eau claire et profonde, renfermé entre deux petites levées revêtues de pierres plates, ou de tables de marbre, posées de champ, et engagées par des rainures dans de gros poteaux de même matière.

Les canaux sont couverts d’espace en espace de ponts, qui ont ou trois, ou cinq, ou sept arches, afin de donner la communication libre des terres. L’arche du milieu est extrêmement haute, afin que les barques puissent y passer avec leurs mâts. Les voûtes sont bien cintrées, et les piles si étroites, qu’on dirait de loin que toutes les arches sont suspendues en l’air.

Ce principal canal se décharge à droite et à gauche dans plusieurs autres plus petits canaux, qui se partagent ensuite en un grand nombre de ruisseaux, lesquels vont aboutir à différentes bourgades, et même à des villes assez considérables. Souvent ils forment des étangs, et de petits lacs, dont les plaines voisines sont arrosées.

Les Chinois ne se contentent pas de ces canaux qui sont d’une commodité infinie pour les voyageurs et pour les gens de commerce, ils en creusent plusieurs autres, où ils ramassent les pluies avec une adresse et un soin admirable, pour arroser les campagnes couvertes de riz ; car le riz demande à être presque toujours dans l’eau.


Du canal Yun leang ou canal royal.

Mais rien n’est comparable au grand canal appelle Yun leang, ou canal royal, qui a trois cents lieues de longueur. C’est l’empereur Chi tsou, chef des Tartares occidentaux, et fondateur de la vingtième dynastie des Yuen, lequel entreprit et fit exécuter ce grand ouvrage, qui est une des merveilles de l’empire. Ce prince ayant conquis toute la Chine, et étant déjà maître de la Tartarie occidentale, qui s’étend depuis la province de