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Page:Dubois - Tombouctou la mystérieuse, 1897.djvu/126

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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

aventurier, qui s’élève à la royauté dans un pays où il est arrivé misérable et nu. Sa première patrie était l’Yemen où venait de naître et de s’affirmer la religion de Mahomet. Peut-être y a-t-il eu maille à partir avec les premiers disciples du Prophète ; peut-être a-t-il quitté l’Arabie justement pour échapper aux violences de leur propagande. Voilà qu’il se retrouve en face d’eux dans sa patrie d’adoption. Il se décide naturellement à un nouvel exil, plus lointain de beaucoup, et non plus en compagnie de son frère seulement, mais entraînant tout son peuple. Quoi qu’il en soit, Dialliaman, voyageur, entreprenant, audacieux et ambitieux comme nous l’a montré l’histoire ; Dialliaman qui, en véritable Arabe qu’il est, change facilement de patrie, paraît tout à fait propre à entraîner à la recherche d’une patrie nouvelle les Songhoïs que de terribles conquérants menacent dans leurs foyers.

La route que prirent les émigrants nilotiques longe d’abord le sud du désert Libyque, puis passe par Agadès, au nord du lac Tchad pour aboutir au Niger, et déboucher aux environs de Gaô. Ils ont suivi la bordure du désert où ils pouvaient en même temps se ravitailler et passer facilement, les populations peu denses aux abords des sables n’entravant point leur marche.

Plusieurs indices viennent à l’appui de cet itinéraire. À Agadès se parle une langue analogue au songhoï. Entre le Tchad et le Niger, sur la limite du désert, les populations sont songhoïs. Et l’on retrouvera sans doute d’analogues traces linguistiques et ethnographiques entre le Tchad et le Nil, le jour où ces contrées seront mieux connues.

Enfin, près de Gaô[1] que nous avons désigné comme débouché des émigrants sur le Niger, dans le pays de Bourroum, une tradition locale rapporte l’arrivée en ces lieux d’un

  1. Gaô est appelée aussi : Koukou, Gago, Garo, Gago, etc.