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Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/267

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AUX GLACES POLAIRES

Le Père Pascal était à poste fixe, dans cette halte, qu’il ne devait remplacer — et par quelle autre hutte ! — que deux ans plus tard.

Il écrivit un jour à Mgr Clut :


Est-il sur la terre un pays plus solitaire que ce Fond-du-Lac ? C’est comme le bout du monde. Il n’y a ici aucun écho. Enfermé dans un misérable château, je coule ici des jours sous toutes les formes. Heureusement que j’ai avec moi le Très Saint-Sacrement et l’image bénie de Notre-Dame de Lourdes. Sans cela je me croirais au rang des prisonniers. Ce n’est pas que je m’ennuie, car le travail ne manque pas. Je veux seulement vous dire que la solitude sera toujours ici, ce me semble, la compagne dû missionnaire. Je prends mon sort avec gaieté de cœur et je chante, je chante, si bien que je crains parfois que le bruit de ma voix ne vienne à disloquer la toiture de ma maison, déjà pas mal penchée…


Deux fois par an, en raquette l’hiver, en canot l’été, le missionnaire de Notre-Dame des Sept-Douleurs s’acheminait vers la Nativité, à 280 kilomètres, pour faire sa retraite et sa confession annuelles :

« — J’avais le temps de faire mon examen de conscience en allant, remarque-t-il, et ma pénitence en revenant. »

Telles furent les seules trêves à sa solitude de sept années.

Mais, seul, l’était-il vraiment ? Le missionnaire est-il jamais seul ? Le divin Solitaire ne demeure-t-il pas avec lui ? Chacun de ceux qui s’isolent, pour le salut des âmes, témoignerait que les consolations éprouvées dans sa vie commune avec Notre-Seigneur suffiraient à prouver la présence de Jésus dans la Sainte Eucharistie.

Cette impression se grava si fortement dans l’âme du Père Pascal, à Notre-Dame des Sept-Douleurs, que dans les sermons ou les conférences qu’il fit ensuite sur les missions du Mackenzie, il omit rarement de parler de ce cœur-à-cœur de Jésus-Hostie et de son prêtre s’immolant tous deux sur l’autel du même Gethsémani.

Le bulletin d’une congrégation religieuse rapportait récemment encore les paroles du prélat, évoquant sa vie de missionnaire :


Un jour, l’isolement dans lequel j’étais plongé se fit sentir d’une manière écrasante. Tout devint si sombre pour moi, que