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Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/361

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AUX GLACES POLAIRES

en 1858, au désespoir du Père Grollier. Mais il n’eut aucune emprise sur les sauvages. Le Père Grollier avait eu le temps d’instruire plusieurs de ceux-ci, qui s’étaient trouvés, avec les barges, au fort Simpson, et de les styler au combat.

Une femme surtout, fameuse dans le Nord, la « bonne femme Houle », que le Père Grollier vit aussi, se chargea du gros de l’ouvrage. Sa qualité de métisse française, sa force musculaire, son aspect de maritorne la faisaient redouter des Blancs et des Peaux-Rouges. Avec ses habits de peau et sa dague fichée à sa ceinture, elle terrorisait les hommes et menait ses maris, en virago. La Compagnie l’avait engagée de longtemps pour son principal bully, sur le trajet du fort des Liards au fort Simpson. Debout à l’avant de la barge, elle émettait ses ordres et tançait l’équipage. Païenne, elle se souvint d’avoir entendu, toute petite ; certaines paroles de son grand-père, touchant une religion qui serait un jour prêchée par des hommes à robe noire, et elle n’eut pas plus tôt appris que M. Thibault avait apporté la Bonne Nouvelle, au Portage la Loche, qu’elle prit congé de la Compagnie, afin d’aller à la Rivière-Rouge voir ce qui en était. Elle revint de Saint-Boniface, instruite, baptisée, et déterminée à mettre au service de Dieu la force et le prestige qu’elle, avait autrefois abandonnés au service du démon. Elle était devenue le modèle de la fidélité conjugale et de la tendresse maternelle. Mais sa dague brillait toujours à son flanc.

Que pouvait Hunter, devant une telle puissance ? Plus tard, lorsque Kirby arriva, pour, détruire l’œuvre du Père Gascon, il la trouva à son tour devant lui, debout et armée. La « bonne femme » s’en prit surtout, unguibus et rostro, au onzième commandement que le malvenu apportait : « Marie, ne la prie point ». Elle trouva pour plaider la cause de la Sainte Vierge des lumières et des élans qui étonnaient les missionnaires.


En 1860, arriva le Père Gascon, premier missionnaire du fort des Liards.

La bonne femme Houle lui servit d’interprète et de sacristain.

En 1863, elle prit le Père. Grouard, son « vénérable fils », sous sa protection, et se fit son institutrice en