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Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/54

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Mais ces sentiments de piété envers le vrai Dieu, s’ils naissaient dans les âmes païennes, ne tardaient pas d’ordinaire à y être étouffés par l’obsédante terreur des esprits mauvais, et c’est devant le sorcier que s’inclinaient bientôt toutes les pensées, toutes les espérances.

« À quoi bon, disait le sorcier, vous occuper d’un esprit dont le devoir est de vous faire du bien ? Laissez-le, et employez vos prières et vos forces à vous rendre propices les puissants mauvais. »


Ces esprits néfastes, l’Indien les voyait par légions : ils remplissaient l’air, soufflaient dans les tempêtes, grondaient
Un sorcier esquimau
qui s’est entaillé la poitrine
dans les rapides, soulevaient les lacs, hurlaient dans les orages, éventaient les chasseurs, dispersaient les poissons, causaient toutes les maladies, frappaient les jeunes gens « que la vie n’avait pas encore usés ». Affolés par la crainte de déplaire à tant de génies malfaisants, les Dénés se prenaient dans un réseau de superstitions, et ne se confiaient plus qu’au charme du sorcier, « l’homme de médecine ».

Le sorcier entre-t-il en communication directe avec les démons ? Plusieurs missionnaires penchent à le croire. Aucun ne l’affirmerait. Il est cependant des faits que ni la prestidigitation ni le charlatanisme n’ont encore expliqués.

La sorcellerie dénée se diversifie selon son objet. La magie noire, qui est la principale, apaise les esprits ; l’opérative exécute des prestiges amusants ou terrifiants ; l’inquisitive retrouve les choses perdues, révèle les allées et venues des absents, hâte l’arrivée des barques, etc. ; la maléfactive jette des sorts sur les ennemis. « Les magiciens, pour le cérémonial de cette dernière, se dépouillent de leurs vêtements, entourent leur tête et toutes leurs articulations de liens et de franges en poils de porc-épic, placent des cornes sur leur