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Page:Dujardin - Les Lauriers sont coupés, 1887, RI.djvu/52

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LES LAURIERS SONT COUPÉS[1]

VI


La rue, noire, et du gaz la double ligne montante, décroissante ; la rue sans passants ; le pavé sonore, blanc sous la blancheur du ciel clair et de la lune ; au fond, la lune, dans le ciel ; le quartier allongé de la lune blanche, blanc ; et de chaque côté, les éternelles maisons ; muettes, grandes, en hautes fenêtres noircies, en portes fermées de fer, les maisons ; dans ces maisons, des gens ? non, le silence ; je vais seul, au long des maisons, silencieusement ; je marche ; je vais ; à gauche, la rue de Naples ; des murs de jardin ; le sombre des feuilles surnageant au gris des murs ; là-bas, tout au là-bas, une plus grande clarté, le boulevard Malesherbes, des feux rouges et jaunes, des voitures, des voitures et de fiers chevaux ; immobilement, au travers des rues, dans le calme immobile de courantes voitures, c’est les courses entre les trottoirs où courent les foules ; ici les bâtisses d’une maison neuve, ces échaffaudages ternes, plâtreux ; on aperçoit mal les pierres nouvellement posées, qui s’échaffaudent ; parmi ces mats je voudrais monter, vers ce toit si lointain ; de là lointainement doit s’étendre Paris et ses bruits ; un homme

  1. Voir la Revue Indépendante, 7 et 8.