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Page:Dulac - La Houille rouge.pdf/24

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— Qui est cette femme qui accouche ?

— Une grue du voisinage qui promet de fournir un bel enfant. Oh !… voyez-vous, il n’y a plus que les irrégulières pour souhaiter des mioches : elles espèrent ainsi attendrir les jeunes et retenir les vieux.

— C’est un calcul comme un autre, répliqua la visiteuse en se dirigeant vers la porte.

— J’attends donc de vos nouvelles, n’est-ce pas, dit Madame Rhœa, la voix soudain bon enfant et maternelle.

— Entendu, je vais en causer… et je viendrai bientôt sans doute…

— Oh ! je ne suis pas pressée ; continua aimablement Rhœa dans un sourire qui découvrit l’extraordinaire longueur des canines.

Cette bouche, ainsi offerte, était féroce au point que Madame Breton flageola sur ses jambes. Elle bredouilla deux ou trois « au revoir » éperdus ; et, dans l’affolement de ses nerfs humiliés, tendit machinalement la main à son bourreau. Celui-ci la retint en riant et lui coula cet adieu familier :

— Je n’en doute pas, ma petite, au revoir… C’est vite fait, allez !

Au salon, nulle des deux femmes n’avait bougé. La pendule de camelote avait sonné une demie, et son timbre grêle n’avait pas dérangé leur rêverie. Comme cela s’était passé déjà, la porte s’ouvrit et la voix de la maîtresse de céans jeta son coutumier :