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ASCANIO.

donc de saluer Colombe avec son méchant sourire et sortit avec messire Robert.

Derrière eux et par la porte du fond, dame Perrine entra, elle avait entendu le prévôt élevant la voix, et elle accourait, devinant qu’il avait fait à sa fille quelques-unes de ses gronderies habituelles. Elle arriva à temps pour recevoir Colombe dans ses bras.

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! s’écria la pauvre enfant en portant sa main sur ses yeux comme pour ne plus voir cet odieux d’Orbec, tout absent qu’il était. Oh ! mon Dieu ! cela devait-il donc finir ainsi ? Oh ! mes rêves dorés ! Oh ! mes espérances mélancoliques ! tout est donc perdu, évanoui, et il ne me reste plus qu’à mourir !

Il ne faut pas demander si une pareille exclamation, jointe à la faiblesse et à la pâleur de Colombe, effrayèrent dame Perrine, et tout en l’effrayant éveillèrent sa curiosité. Or, comme de son côté Colombe avait besoin de soulager son cœur, elle raconta à sa digne gouvernante, en pleurant les larmes les plus amères qu’elle eût encore versées, ce qui venait de se passer entre son père, le comte d’Orbec et elle. Dame Perrine convint que le fiancé n’était ni jeune, ni beau, mais comme, à son avis, le pire malheur qui pouvait arriver à une femme était de rester fille, elle soutint à Colombe que mieux valait à tout prendre avoir un mari vieux et laid, mais riche et puissant, que de n’en pas avoir du tout. Or, comme cette théorie révoltait le cœur de Colombe, la jeune fille se retira dans sa chambre, laissant dame Perrine, dont l’imagination était très vive, bâtir mille plans d’avenir à elle, pour le jour où elle s’élèverait de la place de gouvernante de mademoiselle Colombo au grade de dame de compagnie de la comtesse d’Orbec.