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ASCANIO.

Aussi le prévôt, comprenant qu’il avait affaire à plus fort que lui, se mit-il à rompre, tout en se défendant, il est vrai, mais enfin en cédant du terrain. Malheureusement pour messire Robert, il avait tout naturellement le dos tourné au mur, de sorte qu’au bout de quelques pas il se trouva acculé à la porte, que par instinct il avait cherchée, quoiqu’il sût bien qu’il en avait jeté la clef par dessus la muraille.

Arrivé là, le prévôt se sentit perdu ; aussi, comme un sanglier qui tient aux chiens, réunit-il toute sa force, et trois ou quatre bottes se succédèrent si rapidement, que ce fut à Benvenuto à parer à son tour ; encore une fois arriva-t-il trop tard à la parade, de cette façon que l’épée de son adversaire, malgré l’excellente cotte de mailles qu’il portait, lui effleura la poitrine ; mais, comme le lion blessé qui veut une prompte vengeance, à peine Benvenuto eut-il senti la pointe du fer qu’il se ramassa sur lui-même, et qu’il eût, d’un coup de pointe terrible, percé de part en part le prévôt, si juste au même moment la porte n’eût tout à coup cédé derrière lui, de sorte que messire d’Estourville tomba à la renverse, et que le fer alla frapper celui qui venait de le sauver en ouvrant si inopinément la porte.

Mais au contraire de ce qu’on devait attendre, ce fut le blessé qui garda le silence, et ce fut Benvenuto qui jeta un cri terrible.

Il avait, dans celui qu’il venait de frapper, reconnu Ascanio.

Dès lors il ne vit plus ni Hermann ni Jacques Aubry, qui se tenaient derrière le blessé. Il se jeta comme un fou au cou du jeune homme, cherchant sa plaie des yeux, de la main, de la bouche, et criant : Tué, tué, tué par moi ! As-