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ASCANIO.

de chasser Benvenuto, mais de partager avec lui le Grand-Nesle, qui est assez grand pour contenir trois ou quatre familles. Benvenuto entendra raison. — Eh bien ! que faites-vous ?

— J’écris mes noms et titres au bout du brevet. Vous voyez ?

— Prenez garde pourtant, car le Benvenuto est peut-être plus redoutable que vous ne croyez.

— Bon je vais retenir mes deux spadassins et nous le surprendrons un dimanche.

— Quoi ! vous commettre avec un manant pour un vil intérêt !

— Un vainqueur a toujours raison, et puis je venge un ami.

— Alors, bonne chance ; je vous ai averti, Marmagne.

— Merci deux fois alors : une fois du cadeau et une fois de l’avis.

Et Marmagne, enchanté, mit son brevet dans sa poche et partit en toute hâte pour retenir les deux spadassins.

— C’est bien, dit en se frottant les mains et en le suivant des yeux messire d’Estourville. Va, vicomte, et de deux choses l’une, ou tu me vengeras de la victoire de Benvenuto, ou Benvenuto me vengera de tes sarcasmes ; dans tous les cas la chance est pour moi. Je fais ennemis mes ennemis, qu’ils se battent, qu’ils se tuent, j’applaudirai à tous les coups, car tous les coups me feront plaisir.

Tandis que la haine du prévôt menace les habitans du Grand-Nesle, traversons la Seine et voyons un peu dans quelles dispositions ceux-ci en attendent les effets. Benvenuto, dans la confiance et la tranquillité de la force, s’était remis paisiblement, comme nous l’avons dit, à l’œuvre,