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ASCANIO.

tomba dans son domaine. Les traits principaux de la vio d’Alexandre et de Romulus et la reddition du Havre furent reproduits dans ceux de ses tableaux qui décoraient la Grande galerie et la chambre attenante à la Salle du bal ; il s’en prit à la nature dans les grands paysages du Cabinet des curiosités. Enfin, si nous voulons mesurer ce haut talent, compter ses variétés, additionner son œuvre, nous trouverons que dans quatre-vingt-dix-huit grands tableaux et dans cent trente plus petits, il a tour à tour traité le paysage, la marine, l’histoire, les sujets de sainteté, le portrait, l’allégorie et l’épopée.

C’était, comme on le voit, un homme digne de comprendre Benvenuto. Aussi, à peine arrivé à Paris, Benvenuto courut-il au Primatice les bras ouverts ; celui-ci le reçut comme il venait.

Après cette première et profonde causerie de deux amis qui se retrouvent sur une terre étrangère, Benvenuto ouvrit ses cartons au Primatice, lui expliqua toutes ses idées, lui montra toutes ses esquisses et lui demanda si parmi les modèles dont il se servait il y en avait quelqu’un qui pût remplir les conditions dont il avait besoin.

Le Primatice secoua la tête en souriant d’un air triste.

En effet, on n’était plus là en Italie, cette fille de la Grèce, rivale de sa mère. La France était, à cette époque comme aujourd’hui, la terre de la grâce, de la gentillesse et de la coquetterie ; mais l’on cherchait en vain sur le sol des Valois cette puissante beauté dont s’inspiraient aux bords du Tibre et de l’Arno Michel-Ange et Raphaël, Jean de Bologne et André del Sarto. Sans doute, si, comme nous l’avons déjà dit, le peintre ou le sculpteur eût pu aller choisir son modèle parmi l’aristocratie, il eût trouvé bientôt les