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STANSON.

Je vais les remercier. — (Aux électeurs qui l’entourent.) À tout à l’heure, mes amis ; le haut-bailli s’approche, et le moment décisif n’est pas loin.

(Stanson entre avec ses commissaires dans la taverne de Marlborough. Une musique des rues annonce l’arrivée des troupes d’électeurs bleus et jaunes avec des bannières portant pour inscriptions : Richard pour toujours ! Richard et réforme. Stanson et Derby, Stanson et la Constitution. Les uns ont leur chapeau entouré d’une affiche où se lit le nom de leur candidat ; d’autres portent des placards semblables au bout de longues perches. Le haut-bailli entre à son tour en costume d’ancien magistrat. Les hustings se garnissent de spectateurs parmi lesquels on voit le docteur, Mawbray, Anna et Jenny Grey. Les fenêtres des maisons sont occupées par des femmes, des enfants : on ferme les boutiques.)


Scène XIV.

Les précédents ; LE DOCTEUR, MAWBRAY, MISTRESS GREY, JENNY.
(Richard et Stanson paraissent sur le balcon de leur taverne.)
RICHARD, apercevant le docteur et sa famille.

Mes amis, je suis à vous.

LE DOCTEUR, MAWBRAY, JENNY.

Bonjour, bonjour.

(Ils agitent leurs mouchoirs.)
STANSON, de son balcon.

Mes amis, un renfort vous arrive de l’extrémité du comté ; j’ai fait remonter la rivière par un bâtiment dont le patron m’est dévoué, il vous apporte un supplément de cinquante voix.

RICHARD.

Mon père ! ma bonne mère ! Jenny !

LE DOCTEUR.

Eh bien !

RICHARD.

Tout va pour le mieux. Jenny, vous serez la femme d’un député.

JENNY.

Pourvu que mon mari s’appelle Richard Darlington, c’est tout ce que je désire.

RICHARD.

Et vous, mon père, qu’avez-vous fait pour moi ?

LE DOCTEUR.

Je suis passé chez le notaire, et…

RICHARD.

Mais pour mon élection ?

LE DOCTEUR.

J’ai vu nos amis, ils m’ont promis dix voix.

JENNY, avec joie à Richard.

Richard, le contrat est déjà préparé.

RICHARD, avec distraction.

Très-bien ! — (Au docteur.) Mon père, vous annoncerez publiquement mon mariage, n’est-ce pas, si vous voyez que cela devienne nécessaire à mon élection ?

LE DOCTEUR.

Sois tranquille…

RICHARD, s’approchant de Jenny et la présentant à des électeurs.

Saluez ces messieurs, Jenny ; je viens de leur annoncer que demain vous serez ma femme. (Jenny salue ; Richard reçoit les félicitations de ses amis.)

TOMPSON.

Maître !

RICHARD, se retournant.

Qu’y a-t-il ?

TOMPSON.

Un sloop arrive chargé d’électeurs jaunes, criant : vive Stanson !

RICHARD.

Malheur ! que faire ?… Prends deux cents livres sterling, monte dans une barque, gagne le bâtiment ; deux cents livres pour le patron, pour les descendre jusqu’à la mer, au lieu de les débarquer ici.

TOMPSON.

J’y cours.

(Il disparaît.)
RICHARD.

Pardon, mes amis, si je vous quitte ; mais, vous voyez, il faut faire face à tout.

TOUS.

Adieu, adieu, bonne chance !

(Richard et Stanson avec leurs amis paraissent sur le balcon de leur taverne.)
LE HAUT-BAILLI, après avoir réclamé le silence.

Habitants de Darlington, deux candidats se présentent pour être élus à la chambre des Communes, monsieur Richard et monsieur Stanson ; qu’on les écoute en silence.

(Le haut-bailli s’assied : Richard indique par ses gestes qu’il veut prendre la parole : toute la foule se tourne de son côté. — La musique cesse.)
RICHARD.

Nobles citoyens de la vieille Angleterre ! — (Vivat, houras, huées, voix qui réclament le silence.) C’est un spectacle étrange pour vous qu’un homme nouveau qui vient disputer la place à monsieur