Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/126

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— Vous pourriez, Nicole, remettre à demain ce que vous avez à me dire, mademoiselle est sévère, vous le savez.

— Ah ! oui, je le lui conseille d’être sévère, et avec moi, surtout !

— Nicole, demain, je vous promets…

— Tu promets ! Elles sont belles, tes promesses, et l’on peut compter dessus ! Ne m’avais-tu pas promis de m’attendre aujourd’hui, à six heures, du côté de Maison-Rouge ? Où étais-tu à cette heure-là ? Du côté opposé, puisque c’est toi qui as ramené le voyageur.

— Nicole, songez que l’on vous renverra si l’on s’aperçoit…

— Et vous, l’on ne vous renverra pas, vous, l’amoureux de mademoiselle ; non, monsieur le baron se gênera pour cela !

— Moi, dit Gilbert, essayant de se défendre, il n’y a aucun motif pour qu’on me renvoie.

— Vraiment ! vous aurait-il autorisé à faire la cour à sa fille ? Je ne le savais pas si philosophe que cela.

Gilbert pouvait d’un mot prouver à Nicole que, s’il était coupable, il n’y avait pas au moins de complicité de la part d’Andrée. Il n’avait qu’à lui raconter ce qu’il avait vu, et, tout incroyable qu’était la chose, Nicole, grâce à cette bonne opinion que les femmes ont les unes des autres, l’eût sans doute cru. Mais une idée plus profonde arrêta le jeune homme au moment de la révélation. Le secret d’Andrée était de ceux qui enrichissent un homme, soit que cet homme désire les trésors de l’amour, soit qu’il désire d’autres trésors plus matériels et plus positifs.

Les trésors que désirait Gilbert étaient des trésors d’amour. Il calcula que la colère de Nicole était moins dangereuse que n’était désirable la possession d’Andrée. Il fit à l’instant même son choix, et garda le silence sur la singulière aventure de la nuit.

— Voyons, puisque vous le voulez absolument, expliquons-nous, dit-il.