Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/139

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Un flot de lumière envahit aussitôt la chambre, et fit trembler les paupières violacées de mademoiselle de Taverney.

Elle s’éveilla, et, voulant se soulever, elle sentit une lassitude si grande et en même temps une douleur si aiguë, qu’elle retomba sur son oreiller en poussant un cri.

— Eh ! mon Dieu ! dit Nicole, qu’avez-vous donc, mademoiselle ?

— Est-ce qu’il est tard ? demanda Andrée en se frottant les yeux.

—Très tard ; mademoiselle est restée au lit une heure de plus que d’habitude.

— Je ne sais ce que j’ai, Nicole, dit Andrée en regardant autour d’elle pour s’assurer où elle était. Je me sens comme une courbature. J’ai la poitrine brisée.

Nicole fixa ses yeux sur elle avant que de répondre.

— C’est un commencement de rhume que mademoiselle aura gagné cette nuit, dit-elle.

— Cette nuit, répondit Andrée avec surprise. Oh ! fit-elle en remarquant tout le désordre de sa toilette, je ne me suis donc pas déshabillée ? Comment cela se fait-il ?

— Dame ! fit Nicole, que mademoiselle se rappelle.

— Je ne me rappelle rien, dit Andrée, prenant son front de ses deux mains : que m’est-il arrivé ? suis-je folle ?

Et elle se dressa sur son séant, regardant une seconde fois autour d’elle avec un visage presque égaré. Puis, faisant un effort.

— Ah ! oui, dit-elle, je me souviens : hier, j’étais si lasse, si épuisée… c’était cet orage sans doute ; puis…

Nicole lui montra du doigt son lit froissé, mais couvert, malgré son désordre.

Elle s’arrêta ; elle songeait à cet étranger qui l’avait regardée d’une si singulière façon.

— Puis ?… dit Nicole, avec l’apparence de l’intérêt, mademoiselle avait l’air de se souvenir.

— Puis, reprit Andrée, je me suis endormie sur le tabouret de mon clavecin. À partir de ce moment je ne me souviens plus de rien. Je serai remontée chez moi à moitié endormie, et