Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/160

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— D’un sorcier ? dit Philippe étonné.

— Oui, lequel m’avait en même temps prédit ta venue.

— L’étranger ? demanda timidement Andrée.

— L’étranger, est-ce cet homme qui était près de vous quand je suis arrivé, monsieur, et qui s’est discrètement retiré à mon approche ?

— Justement ; mais achève ton récit, Philippe, achève.

— Peut-être vaudrait-il mieux faire quelques préparatifs, dit Andrée.

Mais le baron la retint par la main.

— Plus vous préparerez, plus nous serons ridicules, dit-il. Continuez, Philippe, continuez.

— J’y suis, mon père. Je revins donc à Strasbourg, je m’acquittai de mon message ; on prévint le gouverneur, M. de Stainville, qui accourut aussitôt. Comme le gouverneur, prévenu par un messager, arrivait sur le glacis, on battait au champ, le cortège commença de paraître et nous courûmes à la porte de Kehl. J’étais près du gouverneur.

— M. de Stainville, dit le baron ; mais attends donc, j’ai connu un Stainville, moi…

— Beau-frère du ministre, de monsieur de Choiseul.

— C’est cela ; continue, continue, dit le baron.

— Madame la dauphine, qui est jeune, aime sans doute les jeunes visages, car elle écouta distraitement les compliments de M. le gouverneur, et, fixant les yeux sur moi qui m’étais reculé par respect :

« — N’est-ce pas Monsieur, demanda-t-elle en me montrant, qui a été envoyé au-devant de moi ?

« — Oui, madame, répondit M. de Stainville.

« — Approchez, monsieur, dit-elle.

« Je m’approchai.

« — Comment vous nomme-t-on ? demanda madame la dauphine d’une voix charmante.

« — Le chevalier Taverney-Maison-Rouge, répondis-je en balbutiant.

« — Prenez ce nom sur vos tablettes, ma chère, dit madame la dauphine en s’adressant à une vieille dame que j’ai su depuis