Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/171

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ces ombrages me plaisent tant que j’y passerais ma vie. Je suis un peu lasse des chambres. C’est dans des chambres que l’on me reçoit depuis quinze jours, moi qui n’aime que l’air, l’ombrage et le parfum des fleurs.

Puis s’adressant à Andrée :

—— Mademoiselle, vous me ferez bien apporter sous ces beaux arbres une tasse de lait, n’est-ce pas ?

— Votre Altesse, dit le baron pâlissant, comment oser vous offrir une si triste collation ?

— C’est ce que je préfère, avec des œufs frais, monsieur. Des œufs frais et du laitage, c’étaient mes festins de Schœnbrunn.

Tout à coup La Brie, radieux et bouffi d’orgueil sous une livrée magnifique, tenant une serviette au poing, apparut en avant d’une tonnelle de jasmin dont depuis quelques instants la dauphine semblait envier l’ombrage.

— Son Altesse Royale est servie, dit-il avec un mélange impossible à rendre de sonorité et de respect.

— Oh ! mais je suis chez un enchanteur, s’écria la princesse en riant.

Et elle courut plutôt qu’elle ne marcha vers le berceau odorant.

Le baron, très inquiet, oublia l’étiquette, et quitta les côtés du gentilhomme vêtu de noir pour courir sur les pas de la dauphine.

Philippe et Andrée se regardaient avec un mélange d’étonnement et d’anxiété, dans lequel l’anxiété dominait visiblement.

La dauphine, en arrivant sous les arceaux de verdure, poussa un cri de surprise.

Le baron, qui arrivait derrière elle, poussa un soupir de satisfaction. Andrée laissa tomber ses mains d’un air qui signifiait :

— Qu’est-ce que cela veut dire, mon Dieu ?

La jeune dauphine vit du coin de l’œil toute cette pantomime ; elle avait un esprit capable de comprendre ces mystères, si son cœur ne les lui eût déjà fait deviner.