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II

ALTHOTAS.


Le voyageur se trouva alors en face d’un vieillard aux yeux gris, au nez crochu, aux mains tremblantes mais actives, qui, enseveli dans un grand fauteuil, compulsait de la main droite un gros manuscrit de parchemin, intitulé la Chivre del Gabinetto, et tenait de la main gauche une écumoire d’argent.

Cette attitude, cette occupation, ce visage aux rides immobiles, et dont les yeux et la bouche seuls semblaient vivre, ce tout, enfin, qui paraîtra sans doute étrange au lecteur, était certainement bien familier à l’étranger, car il ne jeta pas même un regard autour de lui, quoique l’ameublement de cette partie du coche en valût bien la peine.

Trois murailles, – le vieillard, on se le rappelle, nommait ainsi les parois de la voiture, – trois murailles, chargées de casiers qui eux-mêmes étaient pleins de livres, enfermaient le fauteuil, siège ordinaire et sans rival de ce personnage bizarre, en faveur duquel on avait ménagé, au-dessus des livres, des tablettes où l’on pouvait placer bon nombre de fioles, de bocaux et de boîtes enchâssées dans des étuis de bois, comme on fait de la vaisselle et des verreries dans un navire ; à chacun de ces casiers ou de ces étuis, le vieillard, qui paraissait avoir l’habitude de se servir tout seul, pouvait atteindre en roulant son fauteuil, que arrivé à destination, il haussait ou abaissait à l’aide d’un cric attaché aux flancs du siège, et qu’il faisait jouer lui-même.

La chambre, – appelons ainsi ce compartiment avait huit pieds de long, six de large, six de haut, – en face de la portière, outre les fioles et les alambics, s’élevait, plus rapproché du quatrième panneau resté libre pour l’entrée et la sortie, s’élevait,