Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/138

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Voyez-vous, voyez-vous que vous me trompiez ! cria Philippe. Ah ! chère sœur, vous souffrez, vous vous trouvez mal.

— Le flacon ! le flacon ! murmura Andrée en contraignant l’expression de son visage à un sourire qui l’accompagnait jusque dans la mort.

Et son œil défaillant, et sa main soulevée avec peine, indiquaient à Philippe un flacon placé sur le petit chiffonnier près de la fenêtre.

Philippe se précipita vers le meuble, les yeux toujours fixés vers sa sœur qu’il quittait à regret.

Puis, ouvrant la fenêtre, il revint placer le flacon sous les narines crispées de la jeune fille.

— Là, là, fit-elle en respirant à longs traits l’air et la vie, vous voyez bien que me voilà ressuscitée ; allons, me croyez-vous bien malade ? Parlez.

Mais Philippe ne songeait pas même à répondre ; il regardait sa sœur.

Andrée se remit peu à peu, se redressa sur le sofa, prit entre ses mains moites la main tremblante de Philippe, et son regard s’adoucissant, le sang remontant à ses joues, elle parut plus belle qu’elle n’avait jamais été.

— Ah ! mon Dieu ! dit-elle, vous le voyez bien, Philippe, c’est fini, et je gage que sans la surprise que vous m’avez faite, à si bonne intention, les spasmes n’eussent point reparu, et que j’étais guérie ; mais arriver ainsi devant moi, vous comprenez, Philippe, devant moi qui vous aime tant… vous, vous ! qui êtes le mobile, l’événement de ma vie, mais ce serait vouloir me tuer, même si je me portais bien.

— Oui, tout cela est très gracieux et très charmant, Andrée ; en attendant, dites-moi, je vous prie, à quoi vous attribuez ce malaise ?

— Que sais-je, ami, au retour du printemps, à la saison des fleurs ; vous savez comme je suis nerveuse ; hier déjà l’odeur des lilas perses du parterre m’a suffoquée ; vous savez combien ces plumets magnifiques, qui se balancent aux premières brises de l’année, dégagent de senteurs enivrantes ; eh bien,