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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/159

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— Monsieur, répondit Andrée, si je n’avais vu le visage de mon frère s’assombrir et prendre le caractère d’une véritable douleur, si je ne consultais votre extérieur vénérable et la réputation de gravité dont vous jouissez, je croirais que vous vous entendez tous deux pour jouer une comédie à mes dépens, et pour me faire prendre, à la suite de la consultation, par suite de la peur que vous m’auriez faite, quelque médecine bien noire et bien amère.

Le docteur fronça le sourcil.

— Mademoiselle, dit-il, je vous en supplie, arrêtez-vous dans cette voie de dissimulation.

— De dissimulation ! s’écria Andrée.

— Aimez-vous mieux que je dise d’hypocrisie ?

— Mais, monsieur, s’écria la jeune fille, vous m’offensez !

— Dites que je vous devine.

— Monsieur !

Andrée se leva ; mais le docteur la força doucement de s’asseoir.

— Non, continua-t-il, non, mon enfant ; je ne vous offense pas, je vous sers ; et si je vous convaincs, je vous sauve !… Ainsi, ni votre regard courroucé, ni l’indignation feinte qui vous anime, ne me feront changer de résolution.

— Mais que voulez-vous, qu’exigez-vous, mon Dieu ?

— Avouez, ou, sur mon honneur, vous me donnerez de vous une misérable opinion.

— Monsieur, encore une fois, mon frère n’est point là pour me défendre, et je vous dis que vous m’insultez, et que je ne comprends pas, et que je vous somme de vous expliquer clairement, nettement, à propos de cette prétendue maladie.

— Pour la dernière fois, mademoiselle, reprit le docteur étonné, voulez-vous m’épargner la douleur de vous faire rougir ?

— Je ne vous comprends pas ! je ne vous comprends pas ! je ne vous comprends pas ! répéta trois fois Andrée, regardant le docteur avec des yeux étincelants d’interrogation, de défi, et presque de menace.

— Eh bien, moi, je vous comprends, mademoiselle : vous doutez de la science, et