Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/166

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broyée, anéantie ; je réunissais toutes mes forces pour lutter ; tout à coup mes bras raidis se détendirent, un nuage enveloppa mes yeux, mais à travers ce nuage j’eus encore le temps de voir ce même homme.

— Le comte de Balsamo ?

— Oui. Et tu t’endormis ?

— Je m’endormis ou m’évanouis, je ne puis dire. Tu sais comment il m’emporta et comment il me ramena chez mon père.

— Oui, oui ; et cette nuit, cette nuit du départ de Nicole, tu l’as revu ?

— Non, mais j’ai éprouvé tous les symptômes qui annonçaient sa présence : la même sensation étrange, le même éblouissement nerveux, le même engourdissement, le même sommeil.

— Le même sommeil ?

— Oui, sommeil plein de vertiges, dont, tout en luttant, je reconnaissais l’influence mystérieuse, et auquel j’ai succombé.

— Grand Dieu ! s’écria Philippe, continue, continue.

— Je m’endormis.

— Où cela ?

— Sur mon lit, j’en suis bien sûre, et je me retrouvai à terre, sur le tapis, seule, souffrante et glacée comme une morte qui ressuscite ; en me réveillant, j’appelai Nicole, mais en vain ; Nicole avait disparu.

— Et ce sommeil, c’était bien le même ?

— Oui.

— Le même qu’à Taverney ? le même que le jour des fêtes ?

— Oui, oui.

— Les deux premières fois, avant de succomber, tu avais vu ce Joseph Balsamo, ce comte de Fœnix ?

— Parfaitement.

— Et la troisième fois, tu ne le revis pas ?

— Non, dit Andrée avec effroi, car elle commençait à comprendre, non, mais je le devinai.

— Bien ! s’écria Philippe, maintenant, sois tranquille,