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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/58

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— Moi ! dans une trame contre vous ? jamais, madame !

— N’était-ce donc pas vous qui aviez donné à M. de Richelieu le philtre ?

— Quel philtre ?

— Un philtre qui fait aimer éperdument.

— Non, Madame ; ces philtres-là, M. de Richelieu les compose lui-même, car il en connaît dès longtemps la recette ; je ne lui ai remis, moi, qu’un simple narcotique.

— Ah ! vraiment ?

— Sur l’honneur.

— Et M. le duc, attendez donc, M. le duc est venu vous demander ce narcotique, quel jour ? Rappelez-vous bien la date, monsieur, c’est important.

— Madame, ce fut samedi dernier. La veille du jour où j’eus l’honneur de vous adresser, par Fritz, ce petit billet qui vous priait de venir me retrouver chez M. de Sartine.

— La veille de ce jour, s’écria la comtesse, la veille du jour où le roi fut vu se rendant chez la petite Taverney. Oh ! tout m’est expliqué, maintenant.

— Alors, si tout vous est expliqué, vous voyez que je n’y suis que pour le narcotique.

— Oui, c’est le narcotique qui nous a sauvés.

Balsamo attendit cette fois, il ignorait tout.

— Je suis heureux, madame, répondit-il, de vous être bon à quelque chose, même sans intention.

— Oh ! vous m’êtes excellent toujours. Mais vous pouvez plus encore pour moi que vous n’avez fait jusqu’à présent. Oh ! docteur, j’ai été bien malade, politiquement parlant, et, à l’heure qu’il est, c’est à peine si je crois à ma convalescence.

— Madame, dit Balsamo, le docteur, puisque docteur il y a, demande toujours des détails sur la maladie qu’il a à traiter. Veuillez me donner les détails les plus exacts sur ce que vous avez éprouvé, et, s’il est possible, n’oubliez aucun symptôme.

— Rien de plus simple, cher docteur, ou cher sorcier, comme vous voudrez. La veille du jour où ce narcotique fut employé, Sa Majesté avait refusé de m’accompagner à Luciennes. Elle était restée, sous prétexte de fatigue, à Trianon,