Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/241

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bas, et chaque soir il s’attendait à ne pas le retrouver debout le lendemain.

Alors il nous fallut bien reconnaître qu’il y avait eu un tremblement de terre. La première secousse s’était fait sentir dans la soirée du douze, et elle avait été excessivement violente : c’était cette même secousse qui, à l’extrémité de la Calabre, nous avait tous envoyés du pont de notre speronare sur le sable du rivage. Toutes les nuits d’autres secousses lui succédaient, mais on remarquait qu’elles allaient chaque nuit s’affaiblissant ; cependant, soit que les maisons qui n’étaient pas tombées à la première secousse fussent ébranlées et ne pussent résister aux autres, quoique moins violentes, chaque matinée on signalait quelque nouveau désastre. Au reste, Cosenza n’était point encore le point qui avait le plus souffert ; plusieurs villages, et entre autres celui de Castiglione, distant de cinq milles de la capitale de la Calabre, étaient entièrement détruits.

A Cosenza une soixantaine de maisons étaient renversées seulement, et une vingtaine de personnes avaient péri.

Le baron Mollo nous gronda fort de l’imprudence que nous commettions en restant ainsi à l’hôtel ; mais nous nous trouvions si bien dans nos lits, que nous lui déclarâmes que, puisqu’il s’était si obligeamment mis à notre disposition, nous le chargions, en cas de malheur, de nous faire faire un enterrement digne de nous, mais que nous ne bougerions pas d’où nous étions. Voyant que c’était une résolution prise, le baron Mollo nous renouvela alors ses offres de services, nous donna son adresse aux baraques, et prit congé de nous.

Deux heures après nous nous levâmes parfaitement reposés, et nous commençâmes à visiter la ville. C’était le centre qui avait le plus souffert : là, toutes les maisons étaient à peu près abandonnées et offraient un aspect de désolation impossible à décrire : dans quelques-unes, complètement écroulées, et dont les habitans n’avaient pas eu le temps de fuir, on faisait des fouilles pour retrouver les cadavres, tandis que les parens étaient pleins d’anxiété pour savoir si les ensevelis seraient retirés morts ou vivans. Au milieu de tout cela, circulait une confrérie de capucins,