Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/36

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Même bonne chère, même silence. Horace aurait préféré trouver un dîner un peu moins bon, mais avoir avec qui causer.

Il se coucha a huit heures, espérant avancer l’apparition sur laquelle il comptait pour se dédommager de sa solitude de la journée. Comme la veille, les bougies furent scrupuleusement éteintes, et comme la veille effectivement il entendit, au bout d’une demi heure, le petit cri de la boiserie, le froissement de la robe, le bruit des pas sur le parquet ; comme la veille il étendit le bras, et rencontra une main : seulement il lui sembla que ce n’était pas la même main que la veille ; l’autre main était petite et effilée, celle-ci était potelée et grasse. Horace était homme à apprécier cette attention de ses hôtesses, qui avaient voulu que les nuits se suivissent et ne se ressemblassent point.

Le lendemain il retrouva la petite main, le surlendemain la main potelée, et ainsi de suite pendant quatorze jours ou plutôt quatorze nuits.

La quinzième, il rencontra les deux mains au lieu d’une. Vers les trois heures du matin, ces deux mains lui passèrent chacune une bague à un doigt ; puis, après lui avoir fait donner de nouveau sa parole d’honneur de ne point chercher à lever le mouchoir qu’elles allaient lui mettre devant les yeux, ses deux hôtesses l’invitèrent à se préparer au départ.

Horace donna sa parole d’honneur. Dix minutes après, il avait les yeux bandés ; un quart d’heure après, il était en voiture entre ses deux geôlières ; une heure après, la voiture s’arrêtait, et un double serrement de main lui adressait un dernier adieu.

La portière s’ouvrit. A peine à terre, Horace arracha le bandeau qui lui couvrait les yeux ; mais il ne vit rien autre chose que le même cocher, la même voiture et les deux tuppanelles : encore à peine eut-il le temps de les voir, car au moment où il enlevait le mouchoir la voilure repartait au galop. Il était déposé, au reste, au même endroit où il avait été pris.

Horace profita des premiers rayons du jour qui commençaient à paraître pour s’orienter. Bientôt il se retrouva sur