malgré lui amoureux de mademoiselle Danglars ; mais à quatre lettres que je lui ai écrites dans le plus affriandant des styles, Franz m’a imperturbablement répondu : « Je suis excentrique, c’est vrai, mais mon excentricité ne va pas jusqu’à reprendre ma parole quand je l’ai donnée. »
— Voilà ce que j’appelle le dévouement de l’amitié ! donner à un autre la femme dont on ne voudrait soi-même qu’à titre de maîtresse.
Albert sourit.
— À propos, continua-t-il, il arrive, ce cher Franz ; mais peu vous importe, vous ne l’aimez pas, je crois ?
— Moi ! dit Monte-Cristo ; eh ! mon cher vicomte, où donc avez-vous vu que je n’aimais pas M. Franz ? J’aime tout le monde.
— Et je suis compris dans tout le monde… merci.
— Oh ! ne confondons pas, dit Monte-Cristo : j’aime tout le monde à la manière dont Dieu nous ordonne d’aimer notre prochain, chrétiennement ; mais je ne hais bien que de certaines personnes. Revenons à M. Franz d’Épinay. Vous dites donc qu’il arrive ?
— Oui, mandé par M. de Villefort, aussi enragé, à ce qu’il paraît, de marier mademoiselle Valentine que M. Danglars est enragé de marier mademoiselle Eugénie. Décidément, il paraît que c’est un état des plus fatigants que celui de père de grandes filles ; il me semble que cela leur donne la fièvre, et que leur pouls bat quatre-vingt-dix fois à la minute, jusqu’à ce qu’ils en soient débarrassés.
— Mais M. d’Épinay ne vous ressemble pas, lui ; il prend son mal en patience.
— Mieux que cela, il le prend au sérieux ; il met des cravates blanches et parle déjà de sa famille. Il a au reste pour les Villefort une grande considération.