Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/169

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— Je vous avoue, sire, que je n’ajoutais pas grande importance à ce qu’il pouvait dire ; d’ailleurs, j’étais sûr qu’il nierait.

— Mais puisqu’il a avoué.

— Raison de plus. Les premiers aveux ont mis les Guises sur leur garde ; ils ont travaillé pendant que Votre Majesté restait tranquille : c’était forcé, cela.

— Comment ! tu prévois de pareilles choses, et tu ne me le dis pas ?

— Est-ce que je suis ministre, moi, pour parler politique ?

— Laissons cela, Joyeuse.

— Sire…

— J’aurais besoin de ton frère.

— Mon frère, comme moi, sire, est tout au service de Votre Majesté.

— Je puis donc compter sur lui ?

— Sans doute.

— Eh bien, je veux le charger d’une petite mission.

— Hors de Paris ?

— Oui.

— En ce cas, impossible, sire.

— Comment cela ?

— Du Bouchage ne peut se déplacer en ce moment.

Henri se souleva sur son coude et regarda Joyeuse en ouvrant de grands yeux.

— Qu’est-ce à dire ? fit-il.

Joyeuse supporta le regard interrogateur du roi avec la plus grande sérénité.

— Sire, dit-il, c’est la chose du monde la plus facile à comprendre. Du Bouchage est amoureux, seulement il avait mal entamé les négociations amoureuses ; il faisait fausse route, de sorte que le pauvre enfant maigrissait, maigrissait…

— En effet, dit le roi, je l’ai remarqué.

— Et devenait sombre, mordieu ! comme s’il eût vécu à la cour de Votre Majesté.