Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/38

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— Ce page est à vous, Monsieur ? demanda de Loignac à Ernauton en lui désignant du doigt le jeune homme.

— Vous voyez, monsieur le capitaine, dit Ernauton qui ne voulait mentir ni trahir, vous voyez qu’il bride mon cheval.

— Passez, fit de Loignac en examinant avec attention M. de Carmainges, dont la figure et la tournure paraissaient lui mieux convenir que celles de tous les autres. En voilà un supportable, au moins, murmura-t-il.

Ernauton remonta à cheval ; le page, sans affectation, mais sans lenteur, l’avait précédé et se trouvait déjà mêlé au groupe de ses devanciers.

— Ouvrez la porte, dit de Loignac, et laissez passer ces six personnes et les gens de leur suite.

— Allons, vite, vite, mon maître, dit le page, en selle, et partons.

Ernauton céda encore une fois à l’ascendant qu’exerçait sur lui cette bizarre créature, et, la porte étant ouverte, il piqua son cheval et s’enfonça, guidé par les indications du page, jusque dans le cœur du faubourg Saint-Antoine.

De Loignac fit, derrière les six élus, refermer la porte, au grand mécontentement de la foule qui, la formalité remplie, croyait qu’elle allait passer à son tour, et qui, voyant son attente trompée, témoigna bruyamment son improbation.

Maître Miton qui avait, après une course effrénée à travers champs, repris peu à peu courage, et qui, tout en sondant le terrain à chaque pas, avait fini par revenir à la place d’où il était parti, maître Miton hasarda quelques plaintes sur la façon arbitraire dont la soldatesque interceptait les communications.

Le compère Friard, qui avait réussi à retrouver sa femme et qui, protégé par elle, paraissait ne plus rien craindre, le compère Friard contait à son auguste moitié les nouvelles du jour, enrichies de commentaires de sa façon.

Enfin les cavaliers, dont l’un avait été nommé Mayneville par le petit page, tenaient conseil pour savoir s’ils ne de-