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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/257

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C’est cette haine sourde, c’est cette lutte souterraine, qui, tant qu’elle n’est que l’expression des désirs de quelques-uns, échoue et se brise, mais qui, du moment qu’elle devient l’expression de l’intérêt général, engloutit trônes et races, rois et royautés.

Il est facile de comprendre comment les Messéniènnes de Casimir Delavigne, qui paraissaient imprimées concurremment avec ces pamphlets manuscrits, semblaient pâles et décolorées. C’est que Casimir Delavigne était un de ces hommes qui chantent parfois les révolutions accomplies, mais qui n’aident pas aux révolutions à faire.

Le pendant de la pièce de vers dont je viens de citer des fragments fut le procès Maubreuil ; mystérieuse et sombre affaire où les noms, sinon les plus illustres, au moins les plus connus de l’époque, étaient mêlés à un vol accompli et à un assassinat médité.

Je suis peut-être le seul en France qui pense encore aujourd’hui à cette affaire Maubreuil. Peut-être suis-je aussi le seul qui ait conservé une relation sténographiée des séances de ce terrible procès, où l’on essaya, par l’horreur du cachot, par la rigueur du secret, de rendre fou un homme que l’on n’osait pas faire disparaître, et qu’on ne savait comment démentir.

À cette époque, je copiai sur le manuscrit, d’une main étrangère et inconnue, le compte rendu de ces séances. Depuis, j’ai lu, écrite de la main même de l’illustre princesse de Wurtemberg, la relation qu’elle en fit, d’abord pour son mari, le maréchal Jérôme Bonaparte, ensuite pour des mémoires encore inédits, qui sont aux mains de sa famille.