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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/316

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Le faisan, décapité, n’était plus bon qu’à être rôti.

Tant que Piaff-Piaff, en s’attaquant à tout le monde, avait eu l’intelligence de respecter les objets appartenant à Tom, Piaff-Piaff, comme nous l’avons dit, avait joui du bénéfice des circonstances atténuantes ; mais, cette dernière maladresse commise, il n’y avait point de plaidoyer, si éloquent qu’il fût, qui pût sauver le meurtrier. Georges déclara énergiquement qu’il avait mérité la mort. Personne, pas même Janin, n’osa aller contre le jugement.

Le jugement rendu, on résolut de profiter de l’absence d’Harel pour le mettre à exécution, et, tout chaud, tout bouillant, on envoya chercher le charcutier en le prévenant d’apporter son couteau.

Cinq minutes après, Piaff-Piaff poussait des cris à ameuter tout le quartier.

On gardait la porte de la rue pour écarter Harel, si, par hasard, il revenait en ce moment là ; seulement, on avait oublié que le jardin possédait une sortie sur le Luxembourg, et qu’Harel pouvait rentrer de ce côté.

Tout à coup, comme Piaff-Piaff donnait ces notes douloureuses qui annoncent l’approche de l’agonie, la porte s’ouvrit, et Harel parut en criant :

— Qu’est-ce qu’on fait à mon pauvre Piaff-Piaff ? qu’est-ce qu’on lui fait ?

— Ma foi, dit Georges, tant pis ! il devenait trop désagréable, ton affreux Piaff-Piaff !

— Ah ! pauvre animal ! pauvre bête ! s’écria Harel, je parie qu’on l’égorge !

Puis, après une pause d’un instant :

— Au moins, dit-il d’un ton plaintif, avez-vous recommandé au charcutier de mettre beaucoup d’oignon dans le boudin ?… J’adore l’oignon !

Telle fut l’oraison funèbre de Piaff-Piaff.

FIN DU TOME CINQUIÈME.