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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/183

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

son effet ; tandis, que le général Gérard gardait jusqu’au 29 juillet, à cinq heures et demie du soir, la cocarde blanche, M. de Mortemart arrivait à Saint-Cloud, la veille, à sept heures du soir.

Charles X l’avait assez mal reçu ; Charles X ne l’aimait pas ; en effet, M. de Mortemart était un de ces royalistes avariés, entachés de républicanisme, comme les la Fayette, comme les Lameth, comme les Broglie.

M. de Mortemart avait voulu pousser le roi à des concessions ; mais celui-ci, avec une vigueur qui, vingt-quatre heures après, devait se démentir, avait répondu :

— Pas de concessions, monsieur ! J’ai vu les événements de 1789, et je n’en ai rien oublié… Je ne veux pas, comme mon frère, monter en charrette ; je veux monter à cheval[1]!

Par malheur pour cette belle résolution, dès le lendemain matin, les affaires de Paris avaient changé d’aspect. Ce fut alors Charles X qui pressa M. de Mortemart d’accepter le ministère, et M. de Mortemart qui à son tour s’en défendit.

Il comprenait que l’heure où l’apparition d’un ministère mixte eût fait son effet était déjà passée.

Il prétexta une fièvre intermittente rapportée des bords du Danube.

Mais Charles X en était déjà à ce point où les rois, n’essayant même plus de cacher leurs craintes, poussent le cri de détresse.

— Eh ! monsieur le duc, s’écria le vieux prince, vous refusez donc de sauver ma vie et celle de mes ministres ? Ce n’est pas d’un bon serviteur, ce que vous faites là, monsieur !

Le duc s’inclina.

— Sire, dit-il, s’il en est ainsi, j’accepte !

— Bien… Merci, répondit le roi.

Puis, tout bas :

— Maintenant, reste à savoir s’ils se contenteront de vous…

La violence qu’on imposait au vieux roi se faisait jour,

  1. Voir l’Histoire de dix ans, par Louis Blanc.