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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/269

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

que la nouvelle des ordonnances et le bruit des coups de fusil étaient allés le chercher.

Par le peu de mots que nous avons dits déjà, par le silence et les retardements qui accueillirent d’abord les propositions Laffitte, on a pu voir que l’anxiété de Son Altesse fut grande.

Tant que la royauté, à l’état de fantôme, se tint immobile à l’horizon, le duc marcha vers la royauté timidement, obliquement, tortueusement, c’est vrai, mais enfin il y marcha.

Mais, dès que le fantôme se fit réalité ; dès que le fantôme, à son tour, s’anima et marcha à lui ; il eut peur.

Ce fantôme ne s’appelait plus royauté, il s’appelait usurpation ; il n’avait plus sur la tête la couronne de saint Louis, il avait le bonnet rouge de Danton et de Collot-d’Herbois.

Le duc d’Orléans avait le courage ; l’audace lui manquait.

Nous le répétons, — et nous lui faisons un mérite de ce sentiment, — il eut peur.

Pendant les journées du 28 et du 29, il resta caché dans celui des petits pavillons de son parc de Neuilly qui portait le nom de la Laiterie.

Dans la matinée du 29, on lui apporta un boulet qui venait de tomber dans le parc.

Mais, le même jour, après avoir reçu le message de Laffitte : « Une couronne ou un passe-port, » son inquiétude devint telle, que, se croyant mal caché dans le pavillon, il partit pour le Raincy avec Oudard. Il portait un habit marron, un pantalon blanc, un chapeau gris auquel fleurissait une cocarde tricolore faite par madame Adélaïde.

Il laissa, en partant, la note datée de trois heures un quart du matin, afin que l’on crût qu’il était à Neuilly.

Dans la journée du 30, comme nous l’avons dit, après la visite de M. Thiers et de Scheffer, on lui expédia M. de Montesquiou.

Nous avons raconté comment il sortit du Raincy, puis y rentra.

Pendant toute la journée du 30, il resta au Raincy sans donner signe d’existence.

Toutefois, les messages se multipliaient, et, l’un de ces