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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/50

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

teaux portant trente-six mille hommes de débarquement et vingt-sept mille marins, mirent à la voile le 16 mai, et, sortant du port de Toulon, s’avancèrent majestueusement vers Alger.

Voilà pour la conquête d’Alger, qui, on le voit, à la fin du mois de mai où nous allons arriver, était en bon train.

Maintenant, passons à la restitution de nos frontières du Rhin.

Un accident n’avait point, comme l’autre, amené ce projet. Non, c’était une combinaison politique, combinaison dont tout l’honneur doit revenir à M. de Renneval ; car ce fut M. de Renneval qui en conçut et en émit la première idée.

La France et la Russie contractaient une alliance offensive et défensive contre l’Angleterre.

Forte de cette alliance, la France reprenait ses frontières du Rhin, et, fermant les yeux, laissait, de son côté, la Russie prendre Constantinople.

La Turquie crierait, mais on s’en inquiétait peu.

La Prusse crierait, la Hollande crierait. Alors, on prendrait le Hanovre à l’Angleterre, et l’on en ferait deux parts.

On donnerait l’une à la Prusse, l’autre à la Hollande.

Quant à l’Autriche, elle se tairait, grâce à une portion de la Servie, dont on pétrissait un gâteau qu’on lui jetait comme à Cerbère, non-seulement pour l’empêcher de mordre, mais encore pour l’empêcher d’aboyer.

C’était, comme on voit, deux beaux projets à mener de front pour un roi de France. Le même homme abolissant la puissance barbaresque, effroi de la Méditerranée, et rendant à la France ses provinces rhénanes, c’est-à-dire accomplissant un exploit où avait échoué Charles-Quint, et reconquérant par la négociation ce que Napoléon avait perdu par les armes, — c’était à la fois un grand homme de guerre et un grand homme politique.

Qu’avait-on à craindre, et qui pouvait faire échouer la royauté dans ce double projet ?

Deux éléments : l’Océan ! le peuple !