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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/286

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Je crois avoir dit quelque part que c’était à Chéron que Taylor avait succédé.

Au commencement de l’année, le 15 février, était mort aussi le comte Marie Chamans de Lavalette, sauvé, en 1815, par le dévouement de sa femme et celui de deux Anglais, dont je devais retrouver l’un, sir Robert Wilson, en 1846, gouverneur de Gibraltar. Le comte de Lavalette avait survécu quinze ans à sa condamnation à mort, soignant à son tour sa femme, devenue folle des suites de l’effroyable émotion que lui avait causée la fuite de son mari.

Le 11 mars avait inscrit sur la liste nécrologique le marquis de Lally-Tollendal, que j’avais beaucoup connu : c’était le fils du Lally-Tollendal qui avait été exécuté en place de Grève comme concussionnaire, et sur lequel Gilbert, on se le rappelle, a fait des vers qui sont assurément de ses meilleurs. Le pauvre marquis de Lally-Tollendal avait toujours la larme à l’œil ; ce qui ne l’avait pas empêché de devenir énorme. Il pesait près de trois cents livres ; madame de Staël l’appelait « le plus gras des hommes sensibles. »

Dans le même mois était mort Radet, le doyen des vaudevillistes. Dans les dernières années de sa vie, il était possédé de la manie du vol ; ses amis ne s’en inquiétaient plus : quand, après le départ de Radet, il leur manquait quelque chose, ils savaient où retrouver ce qui leur manquait.

Puis, le 23 avril, le chevalier Sue, père d’Eugène Sue ; il était médecin en chef honoraire de la maison du roi Charles X. C’était un homme d’une grande originalité d’esprit, et quelquefois d’une singulière naïveté d’expressions ; ceux qui l’ont entendu faire ses cours de conchyliologie ne me démentiront pas, j’en suis bien sûr.

Puis, le 29 mai, cet excellent Jérôme Gohier, dont j’ai parlé comme d’un vieil ami à moi, et qui ne pouvait pardonner à Bonaparte d’avoir fait le 18 brumaire, tandis que lui, Gohier, déjeunait chez Joséphine.

Puis, le 29 juin, le bon vieux M. Pieyre, l’ancien instituteur, l’ancien secrétaire du duc d’Orléans, l’auteur de l’École des pères ; le même qui, avec le papa Bichet et M. de Parseval