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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 8.djvu/234

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— C’est que le Théâtre-Français vous offre cinq mille francs de prime !

— À moi ?

— Je le sais !

— À moi, cinq mille francs de prime ?

— Je vous dis que je le sais, et la preuve…

Il tira de sa poche cinq billets de mille francs.

— La preuve, c’est que voilà les cinq mille francs que je vous apporte.

Et il me tendit les cinq billets.

J’en pris un.

— C’est bon, lui dis-je ; il n’y a rien de changé au programme ; je lirai après-demain. Seulement, prévenez Lockroy de se trouver à la lecture.

— Eh bien, les quatre autres mille francs ?

— Ils ne m’appartiennent pas, mon cher ; en conséquence, reprenez-les.

Harel se gratta l’oreille et me regarda de côté.

Il était évident qu’il ne comprenait pas.

Il avait tant d’esprit, pauvre Harel !

Le surlendemain, je lisais avec un succès immense à Harel, à Georges, à Janin et à Lockroy.

La pièce fut mise immédiatement en répétition. Elle devait passer aussitôt après un drame de Mirabeau, qui était à l’étude.

Je voudrais bien dire de qui était ce drame de Mirabeau ; mais je ne m’en souviens plus. Ce que je sais, c’est que le rôle principal était pour Frédérick, et que l’on comptait beaucoup sur l’ouvrage.

Quant à Charles VII, il fut distribué ainsi qu’il suit : Savoisy, Ligier ; Bérengère, Georges ; Yaqoub, Lockroy ; Charles VII, Delafosse ; Agnès Sorel, Noblet.

Cette besogne de distribution faite, je me tournai immédiatement vers Richard, dont la couleur toute moderne, le cachet politique, l’allure vivante et même un peu brutale, rentraient mieux dans mon âge et dans ma spécialité que les études du xve et du xvie siècle.