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Page:Dumas fils - La Dame aux camélias, 1852.djvu/19

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V


un pareil lieu, et de cet entr’acte galant à un si terrible mélodrame, s’abandonnait à toute sa fantaisie. Il est non-seulement un grand artiste, mais encore un homme éloquent. Il sait parler aux femmes, passant comme elles d’une idée à l’autre idée, et choisissant les plus opposées. Il adore le paradoxe, il touche au sérieux, au burlesque, et je ne saurais vous dire avec quel art, quel tact, quel goût infini il parcourut, avec cette femme dont il ne savait pas même le nom, toutes les gammes vulgaires et toutes les fioritures élégantes de la conversation de chaque jour.

Ils causèrent ainsi pendant tout le troisième acte du susdit mélodrame, car pour ma part, je fus à peine interrogé une ou deux fois, par politesse ; mais comme j’étais justement dans un de ces moments de mauvaise humeur, où toute espèce d’enthousiasme est défendu à l’âme humaine, je me tiens pour assuré que la dame me trouva parfaitement maussade, parfaitement absurde, et qu’elle eut complétement raison.

Cet hiver passa, puis l’été, et à l’automne suivant une fois encore, mais cette fois dans tout l’éclat d’une représentation à bénéfice, en plein Opéra, nous vîmes tout d’un coup s’ouvrir, avec un certain fracas, une