Aller au contenu

Page:Dumont - Paris-Éros. Première série, Les maquerelles inédites, 1903.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 275 —

— Ah ! tu parles de putain ! garce, chameau, rouleuse ! Je vais te dire qui tu es, toi, car je t’ai connue à Vienne pendant qu’on instruisait ton procès. Tu es une empoisonneuse, et tu es venue faire ton sale métier en France, s’écria-t-elle affolée, rugissante.

— Ose dire que toutes tes manigances du cul et des fesses n’avaient pas pour objet de faire jeter ces deux imbéciles l’un contre l’autre, comme deux marlous qui se disputent une marmite, reprit Micken pour jeter de l’huile sur le feu.

— Il n’y a donc pas ici un homme de cœur pour me défendre contre cette vermine ? s’écria la Morphine tenant tête à l’orage.

— Pas de tragédie ici, commanda le baron Locule. Qu’on remplisse les coupes et buvons à la réconciliation de ces dames. La séance de gros mots est levée.

La Morphine était une maîtresse coquine, qui savait se contraindre devant la nécessité et jouer faux jeu.

Elle prit la coupe dont elle venait d’essuyer le contenu avec le peignoir pourpre roulé en chiffon sur le lit, et, après l’avoir tendue à une verseuse, elle la leva en l’air en s’écriant :

— Je bois à la santé de mes belles ennemies. J’avoue que j’ai eu tort de les traiter de putains. Elles sont ce qu’elles sont et moi ce que je suis ; n’en parlons plus.