Aller au contenu

Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trouble, elle se prit les joues et pencha la tête vers la table.

— Dis ! tu les connais donc si bien que ça ?

Elle haussa les épaules, prise d’un prurit de sincérité.

— Jean, tu dois bien savoir, entre filles, depuis l’âge de douze ans, nous ne parlons que de ça.

— Ça ? dit sottement Jean.

Irritée et agressive, elle coupa :

— Oui, ça…

Ils se regardèrent en silence et Jean Dué comprit d’un coup l’abîme qui sépare les sexes.

Elle reprit :

— Toutes les expériences des sœurs plus grandes et des parentes, des pères et mères, des étrangers qu’on voit vivre, nous sont autant de matières à réflexions. À quinze ans une fille du peuple qui n’est pas bête en sait plus qu’un homme mûr sur…

— L’amour.

Elle acquiesça.

— Nous sommes en garde contre tous les procédés des hommes pour nous séduire.

Il railla :

— Malgré cette mise en garde, aucune fille n’arrive, dans cette ville, à vingt ans, sans avoir perdu…

Lucienne se mit à rire avec méchanceté.