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Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/221

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Des hanches aux genoux, Lucienne, agitée d’un mouvement flexueux, le frôlait avec une lente douceur. Jean Dué sut enfin que quelque chose craquait de son être social, fruit de cinq cents ans d’hérédités éduquées. Un mâle brutal et despote affirmait en lui une exclusive volonté animale. Par un étrange phénomène de conscience, il aima subitement ce moi nouveau comme un frère chéri retrouvé après l’avoir cru perdu.

Les deux enfants reculèrent vers le lit que ni l’un ni l’autre ne voyait.

Lucienne avait cessé de tenir les lèvres de Jean entre les siennes. Elle le baisait sur les yeux à petits coups brefs et lancinants. Lui, le regard clos, avait perdu tout contact avec les étages supérieurs de sa pensée, mais il se reconnaissait en ce Jean Dué enflammé et ardent tenant un corps féminin comme une proie, et qui, en ce moment, aggravait de cette emprise une fièvre d’amour capable d’emplir le monde…

Ils touchaient le bord du lit. Lucienne, qui avait tourné sur soi en reculant heurta le bois de son genou gauche. Elle se laissa tomber et Jean accompagna sa chute sans desserrer son étreinte.

Alors comme un flot de sang efface une blessure, une violente poussée de son inconscient emporta chez le jeune homme le reste de sa force