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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/232

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que c’était une lâche et qu’elle nous trahissait. Il serra le bras de son camarade à le briser. Volusien était très-sombre.

— Qu’aviez-vous donc fait pour moi ? dit Lévise avec véhémence ; en quoi m’avez-vous protégée, aidée ? Vous m’auriez appris à voler le bien d’autrui comme vous faites, à piller, à boire même si j’avais cédé, en quoi me suis-je perdue ? je l’étais déjà quand j’étais avec vous.

Elle se surexcitait elle-même par ce tableau de sa vie passée !

— Vous êtes-vous jamais occupés de moi ? continua-t-elle, vous êtes-vous jamais inquiétés de savoir si je marchais droit ou non ? m’auriez-vous fait aller à l’église, travailler ? Oui, je travaillais pour vous nourrir, quand vous étiez dans vos paresses, et quand vous rentriez ivres, si je ne vous servais pas comme une domestique, vous me battiez. Oui, toi Guillaume, tu comptais que je serais ta femme ! En vérité, c’était là un beau sort pour moi ! la femme d’un loup, d’un tueur ! tu aurais déjà tué des gens, si tu en avais eu l’occasion !

— Cela arrivera peut-être, cria Guillaume, tais-toi ! tais-toi ! Volusien, fais-la taire, je la tordrais comme une baguette !

Mais la fureur de Guillaume redoublait l’emportement de mépris de Lévise. Celle-ci domina un moment encore le ton retentissant du braconnier avec sa voix de femme élevée jusqu’aux dernières cordes de la colère. Elle fit un geste de dédaigneuse protestation et ajouta :

— Vous ne m’êtes rien, ni Guillaume, ni mon frère, je suis libre de faire ce que je veux, je ne vous crains pas, criez, hurlez, jetez-vous sur moi, comme vous en avez envie, avec votre courage ordinaire, je vous ai dit ce que je pense. Eh bien, oui, j’ai trouvé quelqu’un qui m’aime,