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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/252

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Louis, Volusien, elle-même étaient trois êtres pitoyables, elle ne savait lequel plaindre le plus. Elle ne croyait pas avoir mérité une si terrible situation, de tels déchirements. Elle se reprochait tour à tour ses angoisses pour Louis quand elle pensait que Volusien aurait pu être tué, et son inquiétude pour Volusien quand elle songeait qu’il était l’ennemi de Louis. Tant qu’il ne s’était agi que de paroles, elle avait pu s’élever avec la plus grande violence contre son frère, mais maintenant il avait failli arriver une sanglante catastrophe, la mort ! et c’était elle, Lévise, qui portait cette mort dans les plis de sa robe, elle qui eût voulu le bien de ces hommes, elle les rendait pleins de haine l’un contre l’autre. Et puis par quel incompréhensible, quel terrifiant maléfice cette passion si doucement engageante au commencement, remplie de tant de promesses, l’avait-elle conduite brusquement à des maux si intolérables, mise sous la menace d’un sort qu’on ne pouvait envisager sans défaillir de tourment ? Quelle sorcière avait déchaîné ainsi ce misérable Guillaume, en qui Lévise n’avait jamais cru qu’il y eût un danger ? À chacune de ces pensées qui l’écrasaient, les larmes redoublaient, les sanglots prenaient un ton plus douloureux, bien qu’elle cherchât à les étouffer en roulant sa figure dans les draps. Sa pauvre tête se brisait et ne savait quelle protection implorer. Elle n’échapperait donc pas à cette souffrance, elle était donc condamnée sans remise, elle avait commis de telles fautes dans sa vie, elle était donc assez coupable, assez abominable devant le ciel pour en être ainsi abandonnée et accablée. Et Louis, si bon, si doux, qui ne pouvait qu’inspirer l’admiration et l’amitié, serait persécuté avec elle, exposé à la méchanceté de Guillaume et de Volusien. Non, elle avait raison de les haïr. Que leur avait fait Louis ? Pour